Comprendre le comportement des molécules magnétiques dans des espaces minuscules

En mesurant la conductivité électrique d’un nanotube de carbone rempli de molécules magnétiques, une nouvelle étude a permis de mieux comprendre leur comportement.

Les molécules magnétiques pourraient conduire à des avancées en électronique classique. Leurs propriétés complexes s’appliquent-elles aux circuits électroniques ou spintroniques et aux nanodispositifs? En fonction de leur capacité à changer d’état de spin, c’est-à-dire le potentiel d’obtenir des configurations en état haut-spin et bas-spin des électrons, provoquée par des stimuli externes tels que la lumière, la température et la pression, les molécules à transition de spin (SCO pour «spin-crossover») offrent des perspectives encourageantes en ce qui concerne les interrupteurs magnétiques à l’échelle nanométrique. Toutefois, réduits à une taille nanométrique dans des dispositifs électroniques, les systèmes SCO rencontrent certains obstacles. Ils sont instables, ont des propriétés isolantes et le positionnement de nanocristaux dans les nanodispositifs échappe à tout contrôle.

Pour résoudre ces problèmes, l’espoir se porte sur une catégorie particulière de matériaux 1D en carbone appelés nanotubes en carbone monofeuillet (SWCNT pour «single-walled carbon nanotubes»). Des chercheurs soutenus par les projets 2DSPIN, MINT et PINT, financés par l’UE, ont mesuré la conductivité électrique d’un nanotube de carbone rempli de molécules SCO. Ils ont découvert que l’état de spin de ces molécules est totalement modifié par la température, ce qui constitue une découverte pertinente en ce qui concerne les interrupteurs magnétiques et les dispositifs spintroniques. L’étude a été publiée dans la revue «Nature Communications».Les SWCNT sont constitués par un monofeuillet de graphène enroulé sur lui-même pour former un cylindre creux dont les parois ont l’épaisseur d’un atome. Grâce à leurs structures et à leurs caractéristiques dimensionnelles, les SWCNT présentent des propriétés mécaniques, électriques, optiques et thermiques excellentes. Ils peuvent surtout être utilisés comme des conducteurs modèles pour pallier la nature isolante de la molécule SCO. Lorsque les molécules SCO sont encapsulées dans un SWCNT, le nanotube joue le rôle de coque mécanique résiliente qui protège les molécules vis-à-vis de l’environnement et favorise leur positionnement de façon contrôlée dans les nanodispositifs. Pour leurs travaux de recherche, les membres de l’équipe ont utilisé des SWCNT commercialisés et synthétisés selon un procédé de revêtement appelé dépôt chimique en phase vapeur. Les nanotubes ont une pureté de 99 %, leur diamètre varie de 1,6 à 2,2 nanomètres et leur longueur est comprise entre 3 et 30 microns.

Les scientifiques ont encapsulé des molécules SCO à base de fer, solides, unidimensionnelles, dans les cavités 1D des SWCNT pour former des hybrides SCO-SWCNT mixtes sur le plan dimensionnel. Puis, ils ont étudié le transport des électrons au sein de structures individuelles SCO-SWCNT intégrées dans des nanotransistors. «Nous démontrons que la conductance du SWCNT receveur est modifiée par l’état de spin des molécules encapsulées ajoutées. La transition entre deux états de conductance métastables est déclenchée par l’interrupteur thermique SCO. Le confinement des molécules, expérimenté à tour de rôle dans le SWCNT, s’est traduit par un déplacement de la transition SCO sous des conditions de températures plus élevées et l’apparition d’une forte hystérésis thermique, phénomène le plus souvent absent», déclarent les auteurs dans l’article.

L’étude a montré que le mécanisme SCO est capable de résister à l’encapsulation et au positionnement des structures hybrides dans des nanotransistors. L’interrupteur SCO des molécules encapsulées a déclenché une grande bistabilité de la conductance, état dans lequel une molécule peut avoir deux états conducteurs stables, au niveau du receveur SWCNT. «Nos résultats démontrent à quel point l’encapsulation dans des SWCNT représente une étape fondamentale pour la mesure et le positionnement des molécules SCO dans des nanodispositifs. Elle peut aussi faciliter le calibrage de leurs propriétés magnétiques à la nanoéchelle», concluent les auteurs.

Les projets 2DSPIN (2D magnetic materials for molecular SPINtronics), MINT (Mechanically Interlocked Carbon Nanotubes) et PINT (Ultrastrong Composites through Polymers Interlocked with carbon NanoTubes) ont été coordonnés par l’Institut espagnol de nanosciences IMDEA Nanociencia. Les trois projets sont achevés.

Pour plus d’informations, veuillez consulter:

projet 2DSPIN

projet MINT

projet PINT


publié: 2021-06-01
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