Pourquoi mon téléphone ne se recharge-t-il pas en deux secondes?

Nos prises de courant à la maison alimentent aisément les appareils énergivores tels que fours électriques et climatiseurs. Alors pourquoi faut-il autant de temps pour recharger un téléphone portable? Nous en avons demandé la raison à María Rosa Palacín, spécialiste dans le domaine des batteries.

Dans sa forme la plus simple, une batterie se compose de deux électrodes fabriquées à partir de matériaux différents et baignant dans une solution chimique qui permet à une charge électrique de passer d’un élément à l’autre. La réaction chimique entre les électrodes et l’électrolyte génère un excédent d’électrons à une borne et un déficit d’électrons à l’autre, ce qui crée une circulation d’électrons, et donc de l’électricité, grâce au circuit créé entre les deux bornes.

Le courant circule rapidement. Cependant, recharger une batterie n’implique pas seulement une circulation d’électrons, mais aussi un déplacement d’ions plus gros et plus lourds. «En résumé, une batterie est une boîte dans laquelle des électrons circulent d’un côté à l’autre, générant un courant à l’extérieur de la batterie», explique María Rosa Palacín. «Pour compenser ce processus, les ions circulent d’une électrode à l’autre à l’intérieur de la batterie».

Tenter d’accélérer le déplacement des ions dans l’électrolyte semble être la solution tout indiquée pour obtenir une batterie à recharge rapide. Mais voilà, les ions n’aiment pas qu’on les presse: le processus engendrerait des réactions chimiques autres qui dégraderaient les matériaux et affecteraient les performances de la batterie.

Il existe deux principes concurrents pour la conception des batteries, explique María Rosa Palacín: l’optimisation du facteur énergie ou l’optimisation de la puissance fournie. «Vous pouvez augmenter l’épaisseur de l’électrode, faisant ainsi passer la quantité de matériau actif à son maximum», explique-t-elle. «Cela génère beaucoup d’ions (énergie) par kilogramme, mais ces ions doivent traverser l’épaisseur de l’électrode, ce qui prend du temps.»

Cette solution convient aux batteries qui doivent retenir une charge importante et la délivrer lentement. À l’inverse, les batteries peuvent aussi être pourvues d’électrodes fines, ce qui signifie moins de composés actifs par kilogramme de batterie. Ces batteries retiennent une charge moins importante que les batteries haute énergie, mais sont en mesure de fournir, et de recevoir, de l’énergie beaucoup plus rapidement.

María Rosa Palacín, chercheuse à l’Institut des sciences des matériaux de Barcelone, en Espagne, travaille sur une nouvelle génération de batteries. L’ère des batteries volumineuses au nickel-cadmium des années 1990 a laissé la place à la génération actuelle de batteries lithium-ion. Et, aujourd’hui, María Rosa Palacín dirige une initiative financée par l’UE visant à développer un nouveau type de batterie à base de calcium.

Quel que soit le matériau utilisé, les réactions chimiques qui surviennent dans la batterie, comme le chauffage et la formation de dendrites, minuscules excroissances au niveau des électrodes, rendent le processus de charge complexe. Essayer de recharger une batterie en quelques secondes reviendrait à arroser des plantes d’intérieur en déversant d’un seul coup l’équivalent d’une année d’eau, explique María Rosa Palacín.

C’est la raison pour laquelle la plupart des appareils actuels, dont les smartphones, sont assortis d’un logiciel de gestion de la batterie qui s’efforce d’équilibrer la vitesse de recharge et la santé à long terme de la batterie. La batterie ne se rechargera peut-être pas en l’espace de quelques secondes, mais au moins, elle tiendra toujours la charge un an plus tard.

Cliquez ici pour en savoir plus sur les recherches de María Rosa Palacín: Fabriquer une batterie plus performante.


publié: 2022-02-04
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